Une soirée de débat sur le thème «Sécurité sociale-mutualité ensemble pour garantir l’accès aux soins de tous » s’est tenue au syndicat des mineurs à 17h00 ce mardi 24 novembre 2015.
La soirée débat est animée par Jean Philippe Milesy de rencontres sociales.
Sont présents en qualité d’intervenants :
Bruno Forest Président de la Chambre régionale de l’économie sociale et solidaire de Bourgogne
Frédéric Pierru (Docteur en sciences politiques, Chercheur au CNRS-politiques publiques de santé
Jean-Paul Benoît, Président de la Fédération des Mutuelles de France (FMF)
Bernard Coste président de la Carmi, Caisses régionales de sécurité sociale des mines
André Large Mutualité Française Bourgogne, président de la Mutualité de la Nièvre, représentant de la fédération des mutuelles de France.
Nous notons dans l’assemblée Mme le Maire de Montceau Marie Claude Jarrot, Mme Eda Berger Conseillère Départementale, Richard Taiclet 1er Adjoint de Saint Vallier. La CGT est représentée par Christophe Bride secrétaire départemental, Robert Wattebled et Jean Pierre Munier, Patrick Bobin secrétaire syndicat des mineurs CGT.
Nous nous excusons auprès de tous ceux que nous avons oubliés
Un film est projeté sur les 70 ans d’existence de la sécurité sociale, sur les 70 années de lutte, sur toutes les dates essentielles.
Frédéric PIERRU intervient ensuite pendant une demi-heure. Il met en exergue le fait que la charte de la médecine libérale a été signée par les médecins en réaction contre ce qu’ils appelaient la médecine de caisse en 1927. 88 ans après les mêmes médecins libéraux sont contre le tiers payant alors que c’est un des combats de la CGT et de la mutualité française.
Il rappelle que le mouvement mutualiste a été le principal opposant jusqu’en 1960 à la montée en puissance de la sécurité sociale. Le retournement a eu lieu avec la création des mutuelles de fonctionnaires. Ensuite le mouvement mutualiste est devenu le plus ardent défenseur de la sécurité sociale.
Il précise qu’il existe deux types de mutuelles les mutuelles dites du livre II, habilitées à pratiquer les opérations d’assurance, et les mutuelles du livre III, qui gèrent des établissements à vocation sanitaire ou sociale (hôpitaux, centres de santé, laboratoires…). Pour lui ce fut une erreur en 1980 de vouloir adhérer au livre II dans le cadre des directives européennes.
Frédéric PIERRU explique que le gros coup porté à la sécurité sociale le fut en 1967 par la réforme Jeanneney qui pour rétablir l’équilibre financier instaure la séparation des risques en trois branches : Maladie, Famille et vieillesse gérés par trois caisses nationales.
La sécurité sociale était un projet réformiste qui instaurait la démocratie sociale en mettant tout le monde autour de la table en tenant compte des forces en présence ¾ de membres travailleurs (CGT à l’époque) et ¼ patronal. Depuis des années les mêmes forces qui veulent briser la sécurité sociale tentent de substituer le paritarisme à la démocratie sociale. 50/50 au lieu de 75/25.
Il ré explique la construction que le législateur de 1945 à entendu mettre en place.
1) Protection sociale dont 2) sécurité sociale dont 3) assurance santé.
Il s’agissait d’assurer une continuité de revenu au salarié malade par des indemnités journalières, le remboursement des soins n’était qu’une très faible part de l’assurance santé.
Les gens confondent souvent sécurité sociale et assurance maladie qui n’en est qu’une partie
On est passé d’une logique d’assurance santé à une logique d’assurance maladie, avec la CMU on est passé du salarié au citoyen. On a changé de paradigme.
Et pourtant la France a les plus fortes inégalités sociales et devant la mort de toute l’Europe. Pour Frédéric PIERRU on ne peut pas vivre vieux et en bonne santé dans une société inégalitaire.
Il s’élève sur les raisons de la désertification médicale : « il y a assez de médecins mais ils sont mal répartis. Les médecins ont organisé leur propre pénurie avec le Numéris clausus. Pour l’état le Numéris clausus c’était la perspective de moins de prescripteurs donc moins de dépenses, pour les médecins libéraux le Numéris clausus c’était la perspective de moins de concurrence, tout le monde y trouvait son compte, sauf l’assuré social. 40% seulement des médecins diplômés s’installent en libéral. Il y a assez de médecins. L’état est devenu cynique et se dit qu’il va faire supporter la déconstruction de la sécurité sociale par les mutuelles. »
Bernard Coste présente le régime minier qui aura 70 ans l’an prochain. Il explique qu’aujourd’hui si le régime minier n’acceptait pas l’ensemble des ressortissants des autres régimes énormément de gens ne pourraient pas se soigner dans le bassin minier.
Il appelle les affiliés du régime minier à se rassembler le: vendredi 27 novembre à 9 h 30 devant la maison médicale du Bois du Verne pour exiger que la construction du centre de santé multidisciplinaire des équipages avec toutes ses activités intervienne le plus rapidement possible.
André Large présente le tableau dramatique des renoncements aux soins parce que le reste à charge est trop élevé pour les assurés. Il s’élève contre le fait que dans la Nièvre, son département, les dentistes libéraux refusent en majorité de prendre la clientèle CMU. C’est donc la mutualité qui les accueille, les prend en charge. C’est là un transfert forcé. Pour le handicap c’est pareil, l’état français n’a jamais voulu réellement s’en charger, il n’y a pas de réponse libérale et ce sont les mutuelles et les organismes associatifs qui s’en chargent au travers des CAT et des IME. Sauf qu’il n’y a toujours pas de réponses satisfaisantes pour les handicapés vieillissants, pas assez d’EHPAD, etc.
Christophe Bride intervient pour faire le point sur l’évolution des besoins qui nécessite une évolution du système.
Il pointe les graves insuffisances dans les modes de financement, le laxisme de l’état concernant la fraude aux cotisations du patronat, le détournement effectué par la branche maladie professionnel au détriment de la branche maladie générale. Il dit l’opposition formelle de la CGT à la fusion de la CSG avec l’impôt sur le revenu. Il rappelle que la CGT défend la sécurité sociale qui est une idée novatrice et qu’elle défend aussi la couverture de la perte d’autonomie.
Christophe Bride dans son intervention attaque toutes les atteintes au régime actuel et les dévoiements des principes fondateurs. Il se pose la question de la prévention, d’une réelle prévention et de la prise en compte du mal travail qui coûte 80 milliards d’€ par an, la première sécurité sociale c’est aussi d’avoir un travail.
Frédéric PIERRU répond en détaillant les 3 formes de prévention : primaire ; secondaire et tertiaire
La prévention primaire : rassemble l’ensemble des actes visant à diminuer l’incidence d’une maladie dans une population. Pour éviter l’apparition de nouveaux cas elle doit prendre en compte les conduites individuelles à risque et les risques environnementaux ou sociétaux.
La prévention secondaire doit mettre en place des actes destinés à agir dès l’apparition du trouble ou de la pathologie pour stopper son évolution ou faire disparaître les facteurs de risque.
La prévention tertiaire intervient au stade des incapacités chroniques ou des récidives dans une population afin d’en réduire les complications, invalidités ou rechutes consécutives à la maladie.
Mais pour lui la meilleure prévention est encore le plein emploi. Il explique que la prévention de la maladie telle qu’elle est conçue à l’heure actuelle est inefficace voire dangereuse et qu’elle se trompe de cible. Il rappelle à son auditoire que 100% d’une tranche d’âge est mortelle et qu’il ne convient pas de s’intéresser uniquement aux maladies mais au mode de vie.
Mme Jarrot nous explique qu’elle est venue parce qu’elle l’avait promis car ce débat est d’une grande importance et qu’elle mesure l’impact de la désertification médicale sur la population. Elle précise qu’elle s’associe et s’implique pleinement dans le travail effectué par la CARMI et la médecine libérale pour apporter une réponse en termes d’offre de santé satisfaisante.
Bon 70ème anniversaire à la sécu !
En tout cas il lui a été offert un débat de haut niveau ce soit. En écoutant tout le monde on se dit qu’il y a encore du boulot.
Gilles Desnoix