Une douzaine de salariés avec des panneaux pendus au cou distribuent des tracts aux clients qui arrivent. Tout ce passe bien, les gens sont assez réceptifs, on entend des « bon courage ». Un des grévistes ajoute « dame nature est avec nous, regardez, il y a du soleil ». Pourquoi ce mouvement ? Quand a-t-il été décidé ? Par qui ?
C’est, nous dit le représentant du personnel Aurélien Genevois, une sorte de ras le bol face à une absence de dialogue et parce que depuis des années nous voyons baisser nos avantages sans rien avoir en contrepartie.
Même si les mots sont musclés dans la bouche de certains membres du personnel qui l’accompagne, Aurélien Genevois explique qu’ils agissent avec calme, que leur attitude est pacifique. « Nous pouvons comprendre certaines choses, mêmes les contraintes auxquelles la direction est soumise, mais en l’absence de dialogue nous n’arriverons pas à trouver des solutions ensemble »
Ce qui a fait déborder le vase c’est la goutte du lundi matin. Depuis la création du magasin les salariés ont toujours disposé de la fermeture du lundi matin. Pour des raisons de rentabilité, apparemment, ou d’augmentation des marges, c’est selon… il a été décidé d’ouvrir le lundi matin.
Un des arguments de la Direction, il y a une clientèle du lundi matin cequi explique que les salariés aient donc une matinée de repos compensatrice. Et dans ces temps de marasme et de dure concurrence il semble que l’on ne puisse se permettre d’ignorer voire de perdre une partie de la clientèle. Et puis la direction aurait présenté ce changement comme la moins pire des solutions.
Nous ne faisons que rapporter les dires des grévistes.
Cela ne semble pas convaincre les salariés qui eux voient qu’un de leurs acquis depuis 15 ans va disparaître. Comme, disent-ils, l’intéressement et la participation qui ont eux aussi disparu depuis 2008 et 2011 malgré que le groupe Conforama déclare une marge opérationnelle de 5%. Elle est prévue à 7% en 2017.
Le chiffre d’affaire a progressé lui de 15%. Les salariés ont donc l’impression vive de devoir toujours faire plus en étant évincés des fruits de leur travail. Ça c’est pour le « pourquoi ».
A midi moins 10 la direction a été prévenue du mouvement de cet après-midi. Bien sûr il n’y a pas de préavis à respecter mais ça paraît court quand même. Le représentant du personnel nous répond que s’il y avait eu un dialogue, si les salariés avaient été entendus, il n’y aurait pas eu à faire grève parce que la discussion se serait ouverte afin de trouver des solutions autour de concessions communes. Voilà pour le « quand ».
Alors ça doit être tendu comme ambiance à l’intérieur ? Non, pas encore, mais bien sûr s’il n’y a pas moyen d’ouvrir de vraies discussions et de nouer un réel dialogue cela risque de tendre vraiment les relations. Une pétition a circulé et recueilli 22 signatures favorables sur 30 salariés. Donc 73,33% des salariés sont contre le fait que la direction locale ait changé les horaires de travail. En effet, chaque salarié avait droit à une matinée de repos chaque semaine mais avec les changements d’heures d’ouverture depuis le début de l’année : 10 heures au lieu de 9 h 30, il n’y ont plus droit. Si les employés gagnent une demi-heure par jour de travail, ils estiment perdre en qualité de vie personnelle avec cette matinée en moins.
Pour eux moins par moins ça fait plus… plus de contraintes et pas plus d’argent à la fin du mois.
En même temps il n’y aurait pas grève si tout allait bien. Les salariés disent et redisent qu’ils ne sont pas en grève contre leur établissement mais pour qu’enfin ils soient entendus. « On nous écoute, pas de problème, mais on ne nous entend pas, c’est le problème. Nous voulons du dialogue et pas seulement l’énuméré des consignes financières du groupe ».
Et si à la fin de cet après-midi de grève la situation ne bouge pas, que faites-vous ?
« Nous devons nous concerter de nouveau pour décider les suites à donner et pour décider si nous reproduirons des moments de grève dans les semaines ou mois à venir. Ce qui est certain c’est que si la situation ne se décante pas les relations vont se tendre avec la direction et au sein des services. Sachant qu’aujourd’hui tous sont représentés dans cette grève et que 22 salariés sur 30 sont dans le mouvement. Il y a une vraie homogénéité et une bonne entente entre les salariés et les services. »
Ils semblent très décidés.
Robert Wattebled, le secrétaire général de l’union locale de la CGT est présent pour soutenir les salariés en grève de Conforama. Il nous indique qu’il s’agit là de la défense d’un droit acquis face à une politique financière du toujours plus pour les actionnaires et du toujours moins pour les salariés.
Et les clients défilent, prennent les tracts et entrent faire leurs achats. Dedans les quelques non-grévistes et des intérimaires doivent faire face à une bonne fréquentation en ce premier jour de solde. Ceux qui ressortent avec les bras chargés ou qui se rendent au dépôt ne paraissent ni excédés, ni déçus.
A suivre…
Gilles Desnoix